Morgan Dexter n'est pas un mauvais garçon. Au dire de ses voisins, collègues et fréquentations occasionnelles, ce serait même plutôt un voisin charmant, un collègue sympathique ; un bon garçon. Même si certains le trouvent indéfinissablement bizarre. Sans pouvoir expliquer pourquoi. Juste une sensation.
Pourtant, c'est un bon garçon. Souriant. Toujours le mot pour rire. Gentil avec les enfants. Bien habillé. Propre. Méticuleux. Normal. Du moins il s'efforce de paraitre tel. Parce que tout dépend de ce que vous entendez par normal. Dans son genre, il est tout à fait normal. Il se prépare longuement, choisit le bon moment, et offre un travail soigné à ses camarades de jeu.
Son genre, c'est serial killer.
On peut donc affirmer qu'il n'est pas exactement comme tous les autres. Pour lui, les autres, ce sont "les humains". Il se rend bien compte qu'il n'est pas comme eux, avec leurs émotions, leurs coutumes, alors il fait ce qu'il peut pour les imiter, même si de temps en temps, il ne colle pas complètement à l'image que la société attend de lui, même si certaines de ses phrases commencent par "je" et finissent par "nous".
Parce qu'il n'est pas tout seul dans sa tête, Dexter. Il y a aussi le "passager noir" sur le siège arrière, passager clandestin qui prend les commandes de la dextermobile de temps en temps, pour s'offrir une petite virée.
Mais Dexter n'est pas non plus comme tous les serial killer : il ne tue que les méchants. Il ne tue que ceux qui le méritent. C'est à cause de l'éducation très stricte qu'il a reçu de son papa adoptif, ancien flic. Et puis il ne voudrait pas faire de la peine à sa petite sœur, jeune flic. Mieux que ça : à l'occasion, il lui donne un coup de main dans ses enquêtes, grâce à ses "intuitions" à la limite de la divination dès qu'il est question de meurtre !
Alors il choisit ses victimes, il fait des listes de méchants à éliminer et, quand le passager noir réclame son dû les soirs de pleine lune... Jetons un voile pudique sur cette scène de plaisir intime entre ce cher Dexter et son passager noir. Il ne restera à la fin que des sacs poubelle très propres, au contenu bien découpé, parce que bon, ce travail, son vrai travail, c'est avant tout un art, voyez-vous. Et puis le sang, c'est tellement sale. Tellement vulgaire. Juste bon pour les cinglés à la petite semaine.
Le reste du temps, il se fond dans la masse et exerce son métier de couverture avec application. Il est expert judiciaire au service médico-légal de la police de Miami. Sa spécialité, ce sont les tâches de sang...
Le décor est posé, à vous de décider ou non de faire connaissance avec ce charmant garçon. C'est une lecture agréable pour un après-midi au bord de la piscine, une matinée au lit, un moment transat. Je le déconseillerais toutefois pour les nuits d'insomnies, les femmes enceintes, les âmes sensibles, les allergiques à l'humour noir.
Et les serial killer. Qui n'ont aucun humour, ils font juste semblant.
***
Pour aller plus loin :
- Ainsi que le rappelle Kiki en commentaire, Dexter est également une série saluée par la critique, bien plus intéressante que les romans "plutôt médiocres et complaisants" de Jeff Lindsay. (C'est eux qui le disent, moi je suis un gentil, un vrai, je traduis ça par "lecture agréable au bord de la piscine"...)
- La revue d'Olivier en date du 30 juin mentionne cette chronique et complète de manière fort intéressante en mentionnant l'article "Au-delà du mal", de Shane Stevens : l'humanité captivante d'un "serial killer" (article au format pdf disponible sur cette page)
Tuer les méchants, je vote pour ! D'ailleurs, j'y pense, j'en ai laissé un sur le feu, faut qu'j'y retourne... (mais, où est-ce que j'ai mis mon fer à souder...)
RépondreSupprimerPS : Chouette série et chouette chronique, by the way ! Sammy is the best.
Ben moi, j'aime l'humour noir mais j'ai l'âme hypersensible, pis je suppose que pour adhérer faut être pour la peine de mort, même fictive. Je viens de reposer Jane Eyre, ça fait un sacré décalage, si je passe d'elle à psychopathe, non ?
RépondreSupprimerMerci pour ce commentaire Kiki, associé à la revue d'Olivier, il m'a permis d'enrichir cette chronique !
RépondreSupprimerSandrine, c'est pas faux... Mais n'oublions pas que ça se passe aux Etats-Unis, alors on va dire que c'est une circonstance atténuante. Mais effectivement, ne passe pas de Jane Eyre à Jeff Lindsay, c'est pas vraiment du même niveau !