25 mars 2007

Chronique de la recette du bonheur

Le bonheur, nous l'avons vu, consiste à faire ce que l'on aime et dire merde au reste. C'est finalement très simple. Poursuivre des rêves, courir derrière comme l'on court après un van qui démarre uniquement en descente, et se jeter dedans d'un vigoureux coup de jarret. Le bonheur est épuisant. Mais cela peut aussi être se mettre d'accord sur l'essentiel, profiter des petites choses de la vie, savoir qu'un ami pense à vous ou bien éprouver le simple plaisir d'être ensemble, sans même exiger d'être heureux, avant de se rendre compte que ça aussi, c'est du bonheur.

C'est ce que font les personnages d'ensemble c'est tout. Le livre m'avait beaucoup plu, au point d'en faire un commentaire en deux parties, (iciiiii et làààà!) aussi est-ce avec une certaine appréhension que je suis allé voir le film. Je suis souvent déçu par les films adaptés de romans. Il manque toujours des choses, les personnages n'ont pas la tête qu'on leur a imaginé, l'ensemble est bien souvent lissé, édulcoré. Les bords sont arrondis et les intrigues étriquées. Du coup, Harry Potter[1] est trop bien coiffé, Adamsberg[2] pas assez rêveur, et Sauron[3], je le voyais pas du tout comme ça. Et je ne parle pas des libertés petites ou grandes prises avec l'oeuvre originale.


Mais Claude Berri a fait du bon boulot. On retrouve vraiment l'ambiance du livre, cette suite d'évènements qui font la vie, rien que la vie. Une histoire où des êtres commencent par crever de solitude avant de se trouver. On retrouve des dialogues entiers du livre, les situations sont vraiment les mêmes et c'est tout juste si je me suis rendu compte de la disparition de certains personnages secondaires. C'est 1h30 de bonheur sans guimauve, de bons sentiments sans miévrerie. Un bonheur que le livre distille au fil de ses 600 pages, mais que le film -contrainte du cinéma oblige- condense en se contentant de suggérer le rapprochement progressif de Franck et Camille. Le bonheur est transposable au cinéma et j'en suis bien content.

Mais la vraie recette du bonheur, ne serait-ce pas celle que j'ai trouvé dans ma boîte mail il y a quelques jours ?

Il s'agissait d'une de ces chaînes de mails qu'il faut impérativement faire suivre sous peine d'être victime des pires catastrophes. Il était question cette fois-ci des meilleurs moyens pour détecter un AVC. C'est tout simple : il suffit de demander à la personne suspectée d'en faire un (t'as une petite mine toi aujourd'hui, tu serais pas en train de nous faire un accident vasculaire cérébral ?) de sourire, lever les bras, et répéter une phrase simple du type "le soleil est magnifique aujourd'hui". Avec exemple dramatique à l'appui, démontrant que si Julie n'a pas survécu, c'est parce que personne ne lui a demandé de sourire, lever les bras et dire une phrase simple du type "le soleil est magnifique aujourd'hui". C'est triste. C'est regrettable. Et il faut bien sûr faire suivre le message au maximum de personnes possible dans le but, ô combien louable, de sauver des vies.

J'ai évidemment crié au canular et sermonné d'importance mes collègues qui le propageaient complaisamment. Il n'empêche que je trouve ces trois conseils infiniment poétiques. N'est ce point là le vrai moyen du bonheur ? Sourire, à tous, tout le temps ; lever les bras, sans doute pour entourer quelqu'un avec, et répéter inlassablement "le soleil est magnifique aujourd'hui", surtout si ce n'est pas vrai. Parce que le soleil, c'est comme le bleu que les gens du nord ont mis dans leurs yeux, quand il est absent du ciel, il n'en brille que mieux dans les coeurs.

Ce canular sans intérêt, pour qui voulait bien lui prêter suffisament d'attention, cachait le secret de la vraie recette du bonheur. Le bonheur finalement, c'est paisible et délicat comme l'art du Qi gong. Quelques gestes simples, un peu d'attention aux autres, un soupçon d'optimisme.

Le soleil est magnifique aujourd'hui.
Levez les bras.
Souriez.

***

[1] On ne le présente plus je crois...
[2] Le commissaire favori de Fred Vargas, récemment édulcoré dans le
Pars vite et reviens tard de Régis Wargnier
[3] Le grand méchant du
Seigneur des anneaux voyons... c'est d'ailleurs le seul chef d'oeuvre mal écrit que je connaisse

11 commentaires:

  1. Et quand on est handicapé et qu'on ne peut pas lever les bras, on a plus que nos yeux pour pleurer, c'est ça hein ? Pfffff ! ^^

    Sinon je suis contente de savoir que le film traduit bien le livre. Je m'en doutais à voir les extraits, mais je suis contente que tu le confirmes. :-)
    J'ai bien besoin de ce genre d'atmosphère en ce moment, j'irai peut-être demain...

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  2. Ah par contre je vois l'affiche là, et je ne comprends pas...
    L'essence du film c'est quand même que "ensemble c'est tout", alors pourquoi 2 personnages principaux et 2 secondaires ?! J'aime pas du tout ça...

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  3. Ah! Bon! Pendant mes études on m'avait caché cette façon si simple et poétique de détecter un AVC! J'y penserais la prochaine fois que le comportement d'un de mes malades âgés me semblera suspect !
    Mais pourquoi traites-tu donc le Seigneur des Anneaux de chef-d'oeuvre mal écrit ? Moi qui l'ai lu et relu je ne sais combien de fois... Cela étant, je suis comme toi, souvent déçue par les adaptations des livres au ciné, et souvent pas pressée d'aller les voir pour cette raison.

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  4. Ah, l'art du Qi gong... "Caresser la crinière du cheval" est mon geste préféré, je l'avais oublié ! D'où l'intérêt de venir chez Sammy régulièrement.
    Merci Docteur Sam.

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  5. JE VOUS AI COMPRIS !!!! Ton test d'AVC me fait penser aux anciens tire-bouchon qu'on appelait "Général de Gaulle" parce qu'ils levaient "les bras".
    Euh... je peux les baisser
    maintenant ? parce que suis "border crampes" là :-D

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  6. Ca me rappelle un jour, il y a quelques années : j'ai croisé dans la cour de mon immeuble un gars assez haut en couleurs, le genre "fort en gueule", qui n'arrêtait pas de donner son avis sur tout, à tout le monde, tout le temps. Il était accompagné, et je pense qu'il a voulu impressionner le type qui était avec lui en montrant comme il était intelligent. Donc quand nous nous sommes croisés, il m'a agressée parce que je n'étais pas souriante. Il faut sourire, ça ne coûte rien paraît-il. Et c'est tellement important !... Mais moi, je pensais à ma fille, qui me manque tellement. Alors en réponse, je lui ai demandé si lui aussi il avait perdu une petite fille de 6 mois. Il m'a répondu oui, fanfaron, et j'ai plongé mon regard dans le sien. Au bout de quelques secondes, il a bafouillé, bégayé des excuses, il était livide.... Je n'ai même pas dit un mot de plus et je suis partie. Je sais qu'en quelques instants, dans mes yeux, il avait rencontré une douleur. Ma douleur. Et peut-être que maintenant il n'emmerde plus jamais personne en pensant l'obliger à sourire. Parce que non, quand je n'ai pas envie de sourire, je ne souris pas... Et aucun de mes trois enfants ne peut lever les bras. Alors je ne partage pas cette idée du bonheur.

    Mais j'en ai d'autres ;-) ...

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  7. je n'ai pas beaucoup aimé le livre, mais c'est sans importance. Les petits riens font le Tout.;-)

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  8. J'ai vraiment le cerveau lent, ou des séquelles d'AVC mais il m'a fallu 24 heures pour me poser la question qui tue : que se passe-t-il quand on a un AVC et qu'on lève les bras en chantant "let the sun shine" ? Réponds-moi vite Docteur Sammy... je n'ose plus lever les bras !

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  9. le sourire et les bras en l'air , on peut les avoir même si on ne peut rien bouger, et même si une douleur immense vous déchire le coeur .......le sourire et les bras en l'air c'est un état d'esprit , une façon de voir le monde , d'appréhender les gens , d'être ouvert et curieux et sensible....le sourire et les bras en l'air c'est une qualité de l'intérieur....

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  10. Merci Tilu, tu as trouvé les mots justes...
    Oui Sammy allez je change les rôles et pis j'ai le droit de commenter tes comm', je suis bien ... ta...quoi déjà ?
    Vouiii elle est très bien ta chronique ! ;)
    Juste un truc, toi qui est comme moi un gros lecteur, un film n'arrive jamais à la hauteur de la lecture que tu as pu faire ! je ne comprends donc pas ton empressement à voir des fims dont tu as lu les livres ! Personnellement je trouve celà très frustrant car on ne retrouve pas toujours les repères qu'on avait du livre et pis surtout, on y perd en profondeur et et en épaisseur ! ce que tu ne contredis pas toi même !
    Voili-voilou !
    c'est dit, c'est doux ! :-)

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  11. "Oups" Céline... je pense que ça doit marcher aussi en levant les sourcils ^^

    Pour l'affiche, "c'est pas faux"... mais je ne pense pas qu'elle traduise l'atmosphère du film. Va le voir, ça te fera du bien :-)

    Eh oui Orion ! Le progrès fait rage !

    Pour ce qui est du SDA, c'est mal écrit dans le sens où un écrivain ne l'écrirait pas comme ça. Peux-tu concevoir un tel succès avec un livre aussi long, où il ne se passe rien dans le premier tome, et où le découpage du second est fait en dépit de toutes les règles narratives ? (5 chapitres avec Aragorn-Legolas-Gimli à la poursuite des orcs, suivis de 5 chapitres où l'on retrouve Frodon et Sam là où on les avait laissés... pas évident pour suivre) Et pourtant, ça marche, la magie est là et on se laisse prendre par l'histoire...

    J'aime beaucoup aussi le mouvement "gratter le ventre du chien", c'est un des plus rigolos, Posuto :-)

    Vive la bloggie libre ! Vous pouvez baisser les bras soldat Christine !

    Macha, ton commentaire m'a beaucoup touché, et légérement mis mal à l'aise. Je sais bien que telle n'était pas ton intention, mais j'ai pensé pendant quelques secondes que tu avais pu prendre cette légère chronique au pied de la lettre... ce n'est pas dans ma nature d'obliger qui que ce soit à sourire, et je respecte infiniment les douleurs et les peines, mêmes celles que je ne fais que pressentir.

    Ce petit passage se voulait essentiellement poétique/humoristique, car le mail en question, je l'ai réellement reçu (tout ce que j'écris est vrai...), et cette méthode débile, une fois retirée de son contexte, a un certain charme, un peu comme une comptine ; et je la replace régulièrement dans mes mails d'ailleurs.

    J'aimerais bien que tu nous donne ton idée du bonheur, si tu le veux bien :-)

    Je t'embrasse amicalement.


    Melle Bille, je vois que tu me comprends :-)

    Christine, je crains fort que les conséquences ne soient désastreuses. Pas pour l'AVC. Mais pour la météo ^^

    Tilu... c'est exactement ça, tu as tout compris. J'aime beaucoup ta phrase. Merci.

    Que pourrais-tu bien être Delphine ? Ma... directrice de publication ? présidente du fan club ? critique avisée N° 1 ? Ou tout simplement ma meilleure amie, terme peut-être plus simple, mais qui a pour moi tellement d'importance :-)

    Bonne idée que de commenter les commmentaires, c'est vivant, j'aime bien ;-)

    Et en même temps, tu as dit quelque chose de tout à fait vrai, je ne peux que être d'accord ! ben oui, j'explique que je vais être déçu, et j'y vais quand même... ben alors ? il est maso le Yann ? Nooon ! Mais, hormis le fait que ça permet malgré tout de passer un moment agréable, tu as négligé de poser la question "avec qui vas-tu voir le film ?" huhuhu...

    C'est doux, bisous !

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