28 septembre 2006

La vérité toute nue et autres expressions de la bêtise

Ca commence toujours comme ça. Par quelques pudibonds excédés. Ensuite viennent les flammes et les procès. Cette histoire là se passe à Charleroi, mais pourrait tout aussi bien se passer ailleurs.

Une niponne nue sur la façade du musée de la photographie choque le bourgeois. De courageux partisans de l'ordre moral ont lancé des cocktails molotovs sur l'oeuvre il y a quelques nuits.

La voici donc cette photo, il n'y a vraiment pas de quoi fouetter un chat - si vous me passez ce jeu de mot. Eut-elle été pornographique que je l'aurais néanmoins affichée. Contre la connerie, la bêtise, et toute forme de censure. Par principe.


Dans le même ordre d'idées, l'air du temps fait des ravages :
Nous vivons une époque dangereuse, tournant d'un monde qui voit ses repères anciens s'écrouler. Mais les risques les plus grands ne viennent pas de l'extérieur. La bêtise n'a ni frontières ni époque.

Cette brève est peut-être une chronique en devenir. Je ne sais pas encore. Mais je ne pouvais pas laisser passer ça sans réagir.

26 septembre 2006

Intermède à prétention littéraire

Sûrement vous en êtes vous rendu compte, j'aime bien écrire, et j'essaie de mettre une certaine application dans le récit de mes petites aventures ordinaires. Comme je le dis à Madame Proprette en réponse à son commentaire sur la chronique précédente, ce blog est un exercice très intéressant, sur le plan de l'écriture notamment, et le style de la chronique est celui qui se prête le mieux à ce que j'essaie de faire.

J'annonçais aussi une petite nouveauté, la voici. Je plante briévement le décor et je vous laisse lire, c'est déjà suffisament long comme ça. J'ai découvert il y a peu ce blog : Paroles plurielles, qui est tenu par Coumarine (lisez aussi ses Petites paroles inutiles), et qui en quelque sorte un atelier d'écriture en ligne. La dernière fois que j'ai participé à un atelier d'écriture, c'était dans le cadre de mes études -certains lecteurs doivent se rappeller de quoi il s'agit. J'avais vraiment aimé le concept de la consigne, j'ai toujours trouvé ça stimulant, mais je vous en parlerai une autre fois. Peut-être.

Vous l'aurez deviné, il fallait que je mette mon grain de sel là dedans. Le texte qui suit est donc ma première participation à cette joyeuse communauté, et je me propose, sans modestie aucune, de vous faire partager mes contributions.

Voici donc une nouvelle facette de Sammy, petite interruption (récréation ?) dans les chroniques ; ce petit exercice est purement littéraire, ne commencez pas à chercher des rapport avec ceci ou cela... J'ai essayé au maximum de partir de la consigne, de ce que l'image et l'incipit imposé m'inspiraient, et de m'adapter en conséquence. Je dois avouer que l'incipit m'a donné du fil à retordre... J'ai fini par me lancer sans trop savoir ce que je voulais dire, l'idée directrice est venue petit à petit. C'est amusant de voir comment une simple phrase peut influencer toute la suite.

Allez, bonne lecture ! (enfin, j'espère)

Vous écrivez un texte court à partir de la consigne suivante : Incipit (= première phrase): "Je ne l'aime pas, mais tant pis" en vous inspirant de cette belle peinture (Guillemard)


Je ne l'aime pas mais tant pis. Ou plutôt tant mieux, c'est plus simple comme ça. Ca m'évitera des histoires à n'en plus finir. Pas comme la dernière fois. Je ne l'aime pas. Qui a dit que je devais l'aimer ? C'est elle qui est amoureuse, je n'ai rien demandé à personne moi. Je crois bien que je suis ivre. Je ne l'aime pas. Et ce concert. Je joue comme un automate ce soir. Un limonaire, un orgue de barbarie. Je joue, mais c'est l'alcool qui tourne la manivelle. Je bouge mes mains mécaniquement sur le corps de ce fichu instrument que j'adore, en essayant d'oublier son corps à elle.

Je ne l'aime pas. Pourquoi est-ce que je n'arrête pas de penser à elle ? C'est uniquement sexuel. Oui, c'est ce que je vais lui dire. Juste du sexe. Je ne l'aime pas. Si je l'ai cru un moment, c'était dans la fièvre de la première rencontre. Je sais bien que je ne l'aime pas. Je croyais qu'elle le savait aussi. Mais après ce qu'elle m'a dit, c'est différent. Oui, c'est différent. Je vais lui dire ça aussi. Je ne peux pas continuer. Elle va sûrement pleurer. Tant pis. Peut-être va t-elle crier, m'insulter. Pourvu qu'elle ne fasse pas de scandale. Pourvu qu'elle n'appelle pas ma femme. J'aimerais que tout ça soit fini. Et ce concert...

Quelle migraine. J'ai vraiment trop bu. Les sons me rentrent par le sommet du crâne, comme si j'étais un entonnoir. J'entends la musique, mais elle me semble comme atténuée. Tout est étrange autour de moi d'ailleurs. Les autres musiciens semblent bouger à toute vitesse, ils semblent se gondoler, s'effacer, n'être que des formes et du mouvement. Je n'arrive pas à croire que personne n'ait rien remarqué. Il y a bien Paul, qui m'a jeté un drôle de regard tout à l'heure, mais Paul me jette tout le temps de drôles de regards. Va savoir à quoi il pense celui là. Je ne l'aime pas lui non plus. Mais c'est sans importance. Il n'est rien pour moi. Alors que elle... et pourtant je ne l'aime pas. J'aime juste ses formes rondes comme celles d'un violoncelle. Je sais la faire vibrer comme personne. J'aime faire l'amour avec elle. Oui, c'est juste ça que j'aime. Elle, je ne l'aime pas. Ou alors juste son regard. Son regard et son rire aussi. Mais tant pis. Je dois lui dire ce soir. Après ce sera trop dur.

Mais comment lui dire ? Je ne l'aime pas, mais je ne veux pas la faire souffrir. C'est étrange. Mais de quel droit s'accroche t-elle ainsi à moi ? Mais qu'est ce qu'elle croit ? Que je vais tout abandonner, ma femme, mes gosses, ma vie, tout ça juste pour elle ? Et elle, elle me regarde comme si j'étais un dieu. Pauvre folle. Non, je ne l'aime pas. Je ne peux pas l'aimer. Et de toute façon je ne vais pas tout foutre par terre pour elle. Même si elle est bien mieux que Monica. Mais tant pis. C'est quand même la mère de mes enfants. Et je n'aime pas les histoires. Je ne veux pas encore souffrir. Il suffit juste de se dire que je ne l'aime pas. Et qui dit qu'elle me plaira encore dans dix ans ? C'est mieux comme ça. C'est plus raisonnable. Je suis sûr qu'elle comprendra. Je ne l'aime pas, c'est si simple.

J'ai l'impression de flotter à côté de mon corps et de me regarder jouer. Fichu concert. Putain de migraine. J'ai l'impression d'avoir un casque de moto sur la tête. Mais un casque qui péserait une tonne. Mes yeux se ferment malgré moi, mais à ce moment là c'est encore pire. Le casque devient noir et encore plus lourd. Et j'ai tellement mal aux bras. Ce violoncelle est trop lourd. Je ne l'aime pas. Je n'aime rien ce soir. Je n'aime pas la musique. Je n'aime pas cette fille. En même temps, elle est trop belle. Oui, c'est ça : elle est trop belle. Ce n'est pas une femme pour moi. Elle aussi croit m'aimer, mais elle partirait. C'est mieux d'arrêter maintenant. C'est ça que je vais lui dire. Ca ne peut pas marcher entre nous. Elle finirait par partir. Je vais lui dire ça. Je vais la regarder bien en face.

J'aime sa façon de me regarder. Je sais qu'elle me comprend, pas comme l'autre. Mais ce n'est pas de l'amour. Non, je dois vraiment être sûr. Ce n'est pas parce qu'on pense pareil que je vais l'aimer. Ce sont deux choses très différentes. Elle est forte pourtant. Comment fait-elle pour tout deviner comme ça ? J'ai l'impression qu'elle sait tout de moi. Monica ne m'a jamais compris, elle. Elle m'a toujours fait chier en fait. Je ne l'aime plus comme avant c'est vrai. Mais c'est quand même ma femme. Et je ne vais pas tout plaquer comme ça. C'est juste un fantasme. Oui, c'est ça. Juste un fantasme. Ca ne pourrait pas marcher. Et puis divorcer... non, décidemment non. Je délire. Je suis ivre. Complétement. Les partitions semblent danser à mes pieds, je ne suis plus très sûr d'être dans la mesure. Tant pis. Je n'aime pas cet orchestre. Je n'aime pas cette vie. Je devrais tout plaquer et partir avec elle. Non. Non, je ne l'aime pas. Je dois l'oublier. C'est mieux comme ça. Et pourtant elle va me manquer. Tant pis.

J'étreins le violoncelle et je pense à elle. Mes mains deviennent des griffes qui vivent toutes seules. Je voudrais la griffer, la serrer, lui dire... lui dire quoi ? Lui dire que je ne sais plus où j'en suis ? Non, ce serait trop simple. Elle n'attend que ça. Je dois être fort. Je dois penser aux conséquences. Je suis certain que je ne l'aime pas. Tout me parait si simple maintenant. Je ne dois plus hésiter. Vivement que ce concert se termine. Elle m'attend. Comme les autres fois. Mais cette fois c'est différent. Je vais lui dire. Oui, ce soir je lui dis.

Après tout, je ne l'aime pas...

25 septembre 2006

Chronique des boîtes à musique

Lorsque je marche dans les rues de Dijon, le plus pénible n'est pas la pluie, qui n'est pas quelque chose de si désagréable, ou prendre des photos dans les mêmes conditions - on trouve toujours un moyen. Le plus pénible, c'est d'éviter sans cesse les baleines qui manquent de m'éborgner à chaque pas. Et je parle de l'élément constitutif du parapluie, bien sûr, pas de la personne qui le manipule. Eh oui, malgré cette pluie qui fait sortir les parapluies sur les trottoirs et les escargots un peu partout, Sammy est sorti de chez lui pour aller comme promis voir l'apothéose du Festival international de musique mécanique.

Orgues de barbarie, limonaires, automates, passerinettes et autre orchestrions étaient à l'honneur, sans compter les phonographes évoqués l'autre jour. Mais je vous devine perplexes. Comment diantre différencier entre elles ces étranges machines ? Ce n'est pas très compliqué. On peut les classer entre les boîtes à musique de petite taille, les boîtes à musique de taille moyenne, et les boîtes à musique de grande taille. Vous noterez au passage ma toute nouvelle rigueur scientifique, fruit de mes expériences nocturnes.

Exemple de boîte à musique de grande taille

La pluie n'avait pas trop découragé les dijonnais, et la moindre densité en piétons rendait plus agréable la ballade en libérant un peu d'espace ; d'un autre côté, la place gagnée était occupée par l'envergure des parapluies. Je ne suis jamais content. Je précise afin d'éviter d'utérieures et narquoises questions que je n'ai jamais de parapluie. Sauf quand il pleut vraiment trop fort, parce que quand même... parce que bon.

Les mécaniques nasillardes avaient envahi tout le centre ville, égrenant leurs mélodies le long de la rue de la Liberté, et dans quelques ruelles adjacentes. De la Place Darcy à la Place de la Libération, les manivelles tournaient plus ou moins vite en fonction du carton à faire avancer. Certaines machines sont mêmes équipées d'un petit moteur. Ce qui prouve bien que malgré le sourire permanent des manipulateurs, la chose ne doit pas être de tout repos. Certains vont même jusqu'à chanter. D'autres font chanter le public.

Exemple de boîte à musique de taille moyenne,
ornée de sa manivelle et de ses tourneurs chantant

La plupart sont très typiques, beaucoup ne parlent pas le français, certains ont l'air plus vieux que leur machine. Tous en sont très fiers et ils ont bien raison. On retrouve cette même satisfaction de voir une belle mécanique en bon ordre de marche que devant la princesse 241P17. Au delà même de l'aspect artisanal de l'instrument, il y a tout ce décor qui lui donne son charme. On peut trouver ça kitch, rococo, suranné ou folklorique, toujours est-il qu'on imagine difficilement un orgue de barbarie sans ses moulures, ses petits sujets naïfs et ses peintures aux couleurs vives.

Exemple de boîte à musique de petite taille
Tous les orgues ne sont pas aussi proches de cette image traditionnelle. Il y a en a de ravissants, petits coffres anciens en marqueterie, et d'autres à la forme beaucoup moins habituelle, véritables curiosités dans cette famille disparate. C'est le cas par exemple pour cet appareil de la marque Hegophon, concurrent de l'Ariston placé à côté de lui. Le marketing ne s'appelait pas encore comme ça, mais la guerre des formats et de ce qu'il faut bien appeler les lecteurs était déjà vive à l'époque... ça incite à réflexion. Je vais y revenir d'ici la fin de cette chronique.

Jaloux de voir mon voisin Paysan Heureux filmer l'herbe qui pousse et les locomotives qui fument, j'ai décidé de m'essayer moi aussi à l'insertion d'une vidéo, afin que vous puissiez bien saisir la subtilité entre ces deux marques qui, aujourd'hui comme hier, suscitent la curiosité.





Vous l'aurez compris, dans un cas c'est le disque perforé qui tourne sous le bras, dans l'autre c'est le bras qui tourne sur le disque. Autant avouer que si l'un fait bien évidemment penser à nos déjà anciens tournes-disques, l'autre n'est pas sans évoquer une crêpe bretonne étalée avec la petite spatule en bois sur la plaque chaude.... Comment ça je ne pense qu'à manger ? C'est juste l'influence du docteur H, c'est tout !

En tout cas, ce n'est pas vraiment là qu'il faut chercher le véritable ancêtre du vynile et, par extension de toutes les galettes modernes, mais plutôt du côté de l'exposition qui se tenait au Grand Théatre, et que j'ai déjà évoqué il y a quelques jours ; normalement, vous devez être impatient de savoir enfin le fin mot de l'histoire. Non ? Tant pis, je la raconte quand même.


En ces temps héroïques où la Star Academy n'existait pas encore, il y avait quand même des chanteurs. Oui, je sais c'est difficile à croire. C'est pourtant la réalité. Vous devez commencer à savoir que ce blog cultive la plus rigoureuse exactitude scientifique, alliée à un sérieux inébranlable. Mais je recommence à digresser. La musique de ces années là s'écoutait sur des cylindres de résine ou de celluloïd à l'aide d'appareils autour desquels se livraient de véritables guerres commerciales. Même le grand Edison s'y est cassé les dents. L'homme fort du marché, le Bill Gates du cylindre de 2 minutes, était un français du nom d'Henri Lioret. Une exposition assez intéressante lui était donc consacrée dans le cadre de ce festival de la musique mécanique.


Non content d'avoir une bonne longueur d'avance dans le domaine technique, il avait tout compris avant tout le monde à propos de ce que nous nommerions aujourd'hui les standards. Plutôt que de chercher à toute force à imposer sa machine, ses cylindres, ses choix technologiques, il a adapté ses phonographes pour qu'ils puissent lire les produits de la concurrence. Alors que l'on tente de nous imposer de nouveaux supports incompatibles entre eux, je trouve que cette histoire est assez édifiante.

L'homme ne vit-il que pour le commerce ? Les joueurs d'orgues de barbarie ne s'encombrent pas de détails aussi mesquins.

24 septembre 2006

Chronique scientifique des crêpes et de la sagesse populaire

Aussi étonnant que cela puisse paraître, les chercheurs sont des gens comme vous et moi. Je le sais, je les ai rencontrés. Cela se passait la nuit dernière, à l'Atheneum qui n'est pas, contrairement à ce que son nom pourrait laisser croire, une reproduction d'Athènes en linoléum, mais le Centre culturel de l'université de Bourgogne. L'événement avait lieu dans le cadre de la Nuit des chercheurs, encore un événement à l'échelle européenne, beaucoup moins connu que les journées du patrimoine, et c'est bien dommage.


Parce que les chercheurs ne sont pas tous de vieux messieurs en blouse blanche et à la peau décolorée à force de ne pas voir la lumière du soleil. C'est fou, mais des chercheurs, il y en a de tous les âges, de tous les pays et même des deux sexes. Une telle découverte va en étonner plus d'un, je le sais, mais le premier impératif de la méthode scientifique n'est-il pas de savoir remettre en cause ses certitudes ?

Le but de cette nuit était donc de montrer les hommes derrière leur domaine d'activité, de faire comprendre que la science est avant tout une affaire de passion. Voilà pourquoi, au milieu de la musique et des néons à ultra-violets, 10 chercheurs venus de toute l'Europe présentaient leur travail et discutaient avec un public curieux et attentif.

Juste à côté de l'entrée se tenait Calin Pop, un chercheur-philosophe roumain, qui expose sa vision de l’infini chez Blaise Pascal. "La philosophie doit se rapprocher de ce qui est étrange et qui ne se trouve pas à la portée de la main." Tout un programme... Mais c'est à Barbara Rega, une chercheuse italienne en science de l’alimentation et spécialiste des arômes que j'ai parlé en premier. Pendant 20 minutes, il ne fut question que de macromolécules, arômes volatils et polymères bruns. Je n'ai pas tout compris, mais c'était grand et magnifique. J'aurais au moins appris qu'un polymère est un assemblage de molécules, que l'amidon est un polymère de glucose, et que l'ADN est aussi un polymère. Je suis content de tenir un blog, sinon je n'aurais jamais pu replacer ces belles choses.

Notre discussion moléculaire est interrompue par l'annonce de l'imminence de la conférence du Docteur H. Je suis aussi venu pour ça, je ne voudrais pas le rater. Spécialiste mondial dans sa matière, le docteur H est un crêpologue illustre, qui a fait salle comble pour cette intervention qui fut longuement ovationnée.


Veste blanche, chemise à carreau et lunettes carrées, le tout assorti d'un fort accent germanique, le docteur commence par nous remercier pour l'intérêt que nous portons à la crêpe, puis présente le plan du cours. Nous allons tout savoir sur la crêpe, de sa genèse à son comportement en société en passant par ses maladies, le tout précédé d'une introduction sur les différents types de crêpes, et accompagné de projection de diapositives, de citations de multiples livres et de graphiques extrêmement convaincants.
"Il est vrai que nous rencontrons la crêpe ordinaire (Galletta ordinaris domestica), le plus souvent à proximité des hommes, plus rarement en pleine nature"
Bientôt, l'ondulose et la pokomonéose, de même que la tératocrêpologie n'ont plus de secrets pour nous. Nous découvrons au passage le spectromètre de beauté intérieure et quelques révélations sur l'épaisseur des crêpes, qui peut être différente à l'intérieur d'une même crêpe !


Vous l'aurez compris, du moins je l'espère, ce spectacle, qualifié par l'auteur de pièce "absurdo-scientifique" est une invitation à exercer son esprit critique ; en reprenant la méthode et le vocabulaire scientifique et en l'appliquant à un objet dérisoire, Heiko Buchholz n'est pas seulement drôle : il nous rappelle qu'il faut aussi savoir prendre du recul par-rapport à certains faits, et qu'il ne faut pas tout accepter sous prétexte que le discours est scientifique. "Ce n'est pas parce qu'il y a une série de photos et de graphiques ou des citations qu'un fait relaté est vrai."

Je peux maintenant poursuivre la visite des différentes mises en scènes des autres scientifiques.

Parmi ceux que j'ai vu (trop) rapidement, il y a Julien Fatome, ex-recordman du monde de l’ultra-haut débit par fibres optiques. Il a monté une installation de fibres optiques absolument incompréhensible pour le profane, mais ce n'est pas grave, c'est très joli quand même.


C'est d'ailleurs le seul petit reproche que l'on puisse faire à cette manifestation : si l'on ne passe pas au moment où l'homme de science est là, on en sera pour ses frais. C'est dommage, j'aurais bien aimé baver d'envie devant un système capable de générer 160 milliards de signaux lumineux par secondes... Ca c'est du haut débit...

En face du génie de la communication se trouve l'installation de Vanda Gufoni, qui inclut une petite télévision et un bar orné de néons roses, ainsi qu'un petit meuble avec différent verres à bière. Son objet d'étude est l'activité mentale d'une personne qui goûte un aliment, et elle utilise la bière pour mener ses expériences. L'autre extrêmité de la pièce est occupée par la micro-installation de Maciej Zajac, chercheur polonais qui observe et teste le comportement du béton dans différentes conditions. Sur un petit guéridon sont disposés des béchers remplis de graviers pour l'un, de sable pour l'autre, et d'une fine poudre grise pour le troisième. D'autres récipients plus petits contenaient ce que je supposait être plusieurs sortes de béton aux visquosités différentes.


Il y avait aussi Marion Lenoir, une historienne qui cherche à comprendre comment la presse satirique a construit et diffusé les identités nationales, française, allemande et anglaise avant la première guerre mondiale à travers la caricature. Quant à Christophe Cailleaux, il décrypte le passé à travers les parchemins médiévaux et analyse les relations quotidiennes entre communautés religieuses de la Barcelone du XIXème siècle. Le pauvre jeune homme était acculé dans un coin de son espace par une bande de jeunes avides de connaissance. Je n'ai rien pu faire pour lui venir en aide.

Ce ne fut pas le cas pour Alain Robert, spécialiste des termites, qui s'intéresse à la communication de ces insectes sociaux. J'ai pu parler, et voir ses pensionnaires de près. Il les avait apporté avec lui dans un grand tonneau en feraille. J'ai regardé les petites bestioles pendant de longues minutes. Avec un mélange de fascination et de dégoût.


Mais l'installation où j'ai passé le plus de temps est celle d'Aurélia Vasile, jeune historienne roumaine qui prépare son doctorat en histoire à Dijon et consacre ses recherches à l’analyse de documents peu habituels en ce domaine : les films de fiction, et plus particulièrement les films historiques.

J'arrive alors qu'elle diffuse un extrait de film sur une croisade, mets un moment à comprendre de quoi il retourne, et reste en retrait, parmi les gens debout formant un demi-cercle autour de la jeune femme qui explique en quoi le cinéma peut être une arme de propagande. Réalisés sous l’autorité de Nicolae Ceausescu, ces films ont présenté l’histoire de la Roumanie dans un sens propre à flatter le sentiment nationaliste du spectateur. Dans quelle mesure était-il dupe de la manipulation ? En quoi ce type de film a t-il pu soutenir un régime féroce ?

Son travail est autant historique que sociologique ; il est très difficile de mesurer l'impact de la propagande sur le public. Le succès des films ne veut pas dire que leur message est accepté, ni même qu'il est compris.

S'ensuit un dialogue très intéressant entre Aurélia et le public ; je finis par m'asseoir. Nous parlerons de l'influence des images, de la Roumanie aujourd'hui, de la propagande, du nationalisme et du goût pour le cinéma. De sa difficulté à faire accepter son travail par l'ancienne génération d'historiens, formés sous le régime antérieur. De ses parents, de sa vision de la chute du régime à 13 ans, de la façon dont elle a construit son sujet d'étude, du découragement de certains de ses collègues.

A côté de moi s'installe un homme d'âge mûr à l'intellectualité limité, bref, un vieux con. Il apporte un point de vue plaisamment grotesque que je me fais un plaisir de corriger du tac au tac à chacune de ses interventions. En vrac, nous saurons ainsi qu'il a fait en 1981 un voyage en Roumanie à bord de la compagnie aérienne nationale, et à l'écouter, il était surpris d'en être revenu vivant, ce qui tendrait à prouver que ce n'était pas si terrible que ça. Et puis de toute façon, il y a eu des films français censurés aussi. Et en arrivant à l'hôtel, il a cassé la clef de sa porte de chambre dans la serrure, et il a eu très peur d'aller en prison, parce que les "Pays de l'Est, hein, avec tout ce qu'on disait" mais finalement on lui a donné une autre chambre, il n'en revenait pas. Il s'attendait à tout le moins aux travaux forcés pour un tel crime.

Le sommet de l'hilarité est atteint lorsqu'il nous donne son opinion de cinéphile ; puisque le sujet aborde les films historiques, il va nous révéler quel est le meilleur de tous : Titanic ! Oui, il n'est point de plus bel exemple de réalisme historique et de cinéma propre à éveiller la conscience des foules. Je balance entre la colère et la joie, mais décidemment, c'est trop drôle. La sagesse populaire n'est plus ce qu'elle était...

Le comique est partout, la science est dans les détails. Et parfois dans les crêpes.

23 septembre 2006

Chronique de la Comadi et des autres théatres

Les journées du patrimoine ne se contentent pas d'offrir une occasion supplémentaire de visiter musées, châteaux et autres édifices monumentaux, ils ouvrent également à un public avide de révélations les lieux de pouvoir, ou imaginés comme tel. L'homme n'hésite alors plus à faire la queue pendant des heures sous une petite pluie fine, ce qu'il ne consent habituellement à faire qu'avec force protestations. Telle est la force de la curiosité.


C'est ainsi que ce dimanche après-midi, nous nous retrouvâmes (Salut Céline !) à visiter la Comadi. La Comadi, ou la mise en scène de l'importance prise par la Communauté de l'agglomération dijonnaise ; mais cela mérite une petite explication pour les non-dijonnais.

Longtemps, Dijon fut une ville de casernes. Plusieurs se succédaient le long de l'avenue du Drapeau : Vaillant, Junot, Heudelet... Depuis que les guerres avec l'Allemagne sont passées de mode et que l'habitude du service militaire est tombée en désuétude, il a fallu leur trouver un nouvel usage. La plupart ont été rasées pour faire place à des immeubles, d'autres hébergent des fonctionnaires -ces gens là sont partout- et une seule abrite encore quelques militaires qui voient leurs beaux jours partir avec nostalgie. La caserne Heudelet abrite la Comadi.


A l'intérieur, quelques maquettes présentent l'aspect du quartier avant/après. Les 3/4 des bâtiments ont été rasés, seul a été gardé le bâtiment principal, et des pans de murs des bâtiments latéraux, qui servent de support à auvents pour le parking. L'ensemble est assez réussi, clair, lumineux, moderne. Du moins pour ce que nous avons eu le droit d'en voir : le rez-de-chaussée et l'entresol ; sans-doute les étages recélent-ils des secrets qu'il ne faut pas porter à la connaissance de la foule. Ou bien, et cette hypothèse m'apparait plus probable, il y a trop de bazar sur les bureaux pour que cela soit décemment montrable...

Après cette première visite assez calme -il faut dire que le bâtiment de la Comadi n'est pas encore perçu comme étant ce qu'il se fait de plus essentiel en matière de pouvoir local- nous avons prolongé sur le thème de la politique de proximité avec la visite du Conseil Général.



Situé tout à côté de la préfecture (l'histoire des deux bâtiments est d'ailleurs étroitement liée), le Conseil général est un bâtiment qui a tout juste un siècle, et qui se cache derrière les façades plus modernes de la rue, dans un petit jardin délimité au nord par le Conseil régional. Ca doit être très pratique pour la circulation des informations entre les différents services. Les couloirs de cet austère bâtiment s'organisent suivant un tracé en forme de carré, autour de la salle des séances qui se donne à la fois des airs de théatre et de tribunal. D'ailleurs l'intérieur , avec ses banquettes de cuir et de bois, évoque irrésistiblement celui d'un tribunal de province. Il ne manque que les avocats en robe, les prévenus menottés et le public impatient.

Mobilier en bois, tables à pieds tournés et aux plateaux recouverts de cuir vert, cette salle pourrait faire penser à une salle d'étude d'un autre siècle, sentant la poussière studieuse et les choses anciennes. Le plafond peint, avec ses moulures dorées, et sa frise des blasons des chefs lieux du département, donne cependant à l'ensemble ces faux airs de théatre évoqués tout à l'heure. Le vaste bureau en bois du Président et de ses vices (vices présidents, rhooo, vous alors) suggère à nouveau l'image d'un tribunal.


Le prospectus distribué à l'entrée nous informe en outre de l'existence d'une Commission d'héraldique, chargée d'attribuer des armoiries aux communes dépourvues qui en font la demande. Voilà un travail bien joli, qui ne se soucie que des plus grandes choses. Je repars charmé, soulagé d'apprendre qu'un comité de blasonnologie veille à nos destinées.

Après un bref détour par l'hôtel de Voguë, un des plus beaux hôtels particuliers de la ville, nous nous dirigeons vers le dernier théatre de cet après midi, un vrai cette fois. Le "grand" théatre. J'ai été amené à l'évoquer a plusieurs reprises dans ces pages, soit qu'il abrite une déprime nocturne et musicale, soit qu'il accueille des grognards ridiculement chamarés. Ce n'était pas à proprement parler une découverte totale, mais je n'avais jamais rien vu de plus que l'entrée et la salle, alors qu'il y a des étages, des salons, un bar !


Le deuxième étage recelait une exposition de phonographes, charmants objets du passé dont on pourrait tirer quelques réflexions intéressantes, mais j'en reparlerai ; la chose entrant dans le cadre plus vaste du Sixième festival international de musique mécanique. Ca ne s'invente pas, c'est à Dijon, et vous en saurez bientôt davantage. Oui, je suis prêt à toutes les vilenies pour fidéliser mon lectorat !


Mais, me direz-vous, Dijon ne propose t-elle rien d'autre à la visite que ses institutions administratives et un théatre ? Cette ville chargée d'Histoire ne compte t-elle pas de vastes bâtiments, de prestigieux monuments, de magnifiques églises et des hôtels particuliers somptueux ? Si, mais nous les avons visité l'an dernier ! Je vous en parlerai donc une prochaine fois. Repartant chez moi en flânant, je tombe d'ailleurs sur un guide et son groupe ; je me joins à la foule et je tourne encore une bonne heure par les rues du vieux Dijon, tant que le parcours de la visite va dans ma direction.

Mais les milles détails évoqués ce soir là sont une autre histoire...

21 septembre 2006

Un monde formidable

Entendu sur Inter : le département de la Justice du Texas a mis en ligne les dernière paroles des condamnés à mort. Vous pourrez maintenant savoir à quoi pense un homme qui va recevoir une injection mortelle.

Et celui qui a mis 90 minutes pour mourir, on a vraiment recueilli toutes ses dernières paroles ?

S'cusez moi, il faut que j'aille vomir là...

20 septembre 2006

Chronique des préfets en pantoufles

Aux derniers des beaux jours, quand le vent pousse quelques nuages dans un ciel où le soleil se voile, l'Europe toute entière descend dans les rues et visite ses monuments. On appelle cela les Journées du patrimoine. Il fallait bien que l'on finisse par se mettre d'accord sur au moins un sujet. La culture n'est pas le moins beau.

Les bâtiments les plus prestigieux et les plus administratifs ouvrent leurs portes. La foule se presse pour visiter le bureau du Premier Ministre. On se bouscule aux grilles des châteaux. Des ministres s'amusent à guider les badauds à l'intérieur de l'arc de triomphe, pâle copie de la Porte Guillaume. On se piétine devant le siège des journaux. Les enfants échappent à la vigilance de leurs parents. Certains tombent dans les oubliettes. On voit par là que la passion du patrimoine pousse à faire des choses grandes et magnifiques.
Les préfets se tiennent bras croisés sur leur perron et accueillent le public d'un sourire crispé. Parce que ce n'est pas très amusant de faire visiter sa maison. Car la Préfecture est la maison du Préfet. Il faut le comprendre cet homme.

Comme j'arrive dans la cour d'honneur de la préfecture, je constate avec un sourire moqueur (oui, oui, moi, je suis moqueur) que le conférencier au micro est le même que l'année dernière. Sans doute fait-il partie des meubles. Le même joyeux drille lénifiant. Comme j'ai déjà écouté son exposé avec plus d'attention qu'il n'était nécessaire la fois précédente, je me considère dispensé de l'exercice, et laisse la foule se masser au pied de l'escalier d'honneur, me calant confortablement au chambranle de l'entrée. Retourné au bas des marches, le préfet discute avec quelques collaborateurs, se dirige vers la porte monumentale donnant sur la rue, parle avec des factionnaires, vaque à ses occupations.


Les explications sur la chambre bleue où a dormi le général de Gaulle et le bureau où Alexandre Dumas n'a jamais écrit ne me passionnant vraiment pas, j'observe les gens qui m'entourent. Certains sont bien habillés, d'autres s'efforcent de l'être. Un monsieur à côté de moi, trapu, ventru, chauve et luisant, orné d'une décoration inconnue, a visiblement sorti ce qu'il avait de plus beau. Un costume gris souris avec des petits carreaux. Il l'avait déjà pour le mariage de son cousin. En 1967. A moins que ce ne soit le costume du témoin, ce que laissent supposer les ourlets récemment défaits -on voit encore la trace de la piqûre. Un petit fil pend dans son dos.

Un autre, plus jeune, la quarantaine arrogante et stigmatisée de la légion d'honneur, m'apparait particulièrement antipathique dès le premier regard. Ce n'est pas sa faute, le tort m'incombe totalement. Il est bien habillé, il a des chaussures propres et une femme avenante. Alors quoi ? Il avait le petit détail qui casse tout : la coiffure. Je ne suis pas du genre à m'offusquer du manque de rigueur capillaire, bien au contraire. Avec ma tête de Fantasio, ce serait mal venu. Mais le bon goût n'est visiblement pas la chose du monde la mieux partagée. Il a la nuque rase, les cheveux coupés très courts, dans le plus pur style légionnaire. Sauf sur le devant où, par une coqueterie mal avisée, il a tenu à conserver une mèche qui hésite entre la banane du rocker au réveil et l'évocation hitlérienne. Bref ce n'est pas une réussite.

Voilà deux hommes qui n'ont pas bénéficié des services des meilleurs ouvriers de France. Car c'est la raison de ma présence en ce lieu à cette heure matinale (pensez donc, il est tout juste 10 heures). On m'a laissé entendre qu'il y aurait un chocolatier parmi les artisans, et je suis venu juste pour ça...

(Bureau du Préfet, journées du Patrimoine 2005)

Sur ces entrefaites, le préfet revient, le journal et le programme télé calés sous le bras ; je l'imagine un instant traversant la cour en pantoufles le matin de bonne heure, pour aller aux nouvelles vers la concierge et récupérer son courrier. On peut toujours rêver. Quoi qu'il en soit, il est comme moi bloqué par la foule. Il s'agite, parle tout bas en direction du conférencier qui s'éternise. Va t-il lui demander de presser le mouvement ? Il l'avait déjà fait l'an dernier. Comme il est à quelques pas de moi, j'ai tout le loisir de l'observer à son tour. Son blazer n'est pas assorti à son pantalon. Venant d'un tel personnage, c'est décevant. Il ne se doutait pas que je rapporterai ça, sinon il les aurait choisis de la même couleur, soyez-en sûrs.

La petite touche en plus en 2006 : les poules en céramique

Il ne se doute pas non plus qu'il est à côté de l'un de ses nombreux subordonnés indirects. Ce qui n'est pas plus mal. Notre seul échange, près de deux ans auparavant, s'était limité à quelques grimaces et gesticulations par lesquelles il tentait de me faire comprendre que je l'éblouissait avec un vidéoprojecteur... La momie finissant enfin son exposé -dont une salvatrice panne de micro nous a épargné un bon morceau- la visite va pouvoir commencer. Visite, c'est vite dit. Comme l'an dernier, elle se résume à la suite présidentielle où ont dormi Napoléon et le général De Gaulle (mais où Alexandre Dumas n'a jamais écrit, il est bon de le rappeller), le salon bleu, le bureau du préfet et le jardin.

Par acquis de conscience, je fais un rapide tour des lieux, déambulant avec des airs de propriétaire au milieu de la populace la foule du week-end. Si ce n'est les poules en céramique sur la cheminée, (soutien à la filière avicole ?) rien n'a vraiment changé. Je repère au passage la table avec les sculptures monumentales en chocolat. Apparemment, il n'y a rien à manger. Faisons d'abord le tour des autres, on finira par ça.


Parmi les meilleurs ouvriers de France disséminés à travers l'hôtel, il y avait un restaurateur de tableaux, un paysagiste, deux tailleurs de pierre et un serrurier ; un couvreur et un chauffagiste. Seul le restaurateur était intéressant, mais malgré mes questions, je suis resté sur une impression de frustration. Il faut plus de 10 minutes pour bien parler de la restauration des tableaux en général... J'ai d'ailleurs un peu regretté l'absence d'explications de leur travail par ces ouvriers. La plupart se prêtaient aimablement au jeu des questions, mais d'autres n'étaient pas visibles, laissant le public seul face au travail exposé pour l'occasion, et cherchant à en découvrir le sens profond - c'est moi le public.

Il est maintenant temps de retourner près du chocolatier. Les sculptures dégagent une odeur sur laquelle il n'est pas possible de se tromper. Sans elle, le doute serait permi quant à leur composition. C'est bien du chocolat. Gourmand, Sammy pensait naïvement que l'on allait lui en donner des brouettes. Ou des seaux à la rigueur. Ou au moins une grosse poignée. Eh bien, non. Le chocolat, c'est cher, et il n'aura droit qu'au pavé d'or réglementaire que deux hôtesses proposent à la sortie. Ce n'est pas si mal. Au moins aura t-il pu parler à l'artiste ! Fabrice Gillotte parle de son art avec précision et courtoisie.

Je sais maintenant où acheter du bon chocolat.
Vu le prix, ce n'est pas un détail...

***
Envie de découvrir ?

19 septembre 2006

J'entends siffler le train

Je rencontre des gens grâce à ma chronique sur les belles fée railleuses qui ont leurs vapeurs ! J'ai découvert que j'avais un voisin blogueur, qui avait lui aussi été la voir. Un voisin des champs. Nous formons ainsi le joli couple du bloggeur des villes et du bloggeur des champs. Non, ce n'est pas une fable !

Nous avons donc été voir la même chose quelques kilomètres de distance, sauf que lui il a aussi filmé !

L'expression de la semaine

"Tu ne verrais même pas un Diddl dans un rayon de Barbies !"
Copyright Amélie ;-)
et merci à sa maman de nous en avoir fait profiter !

Cadillac... le retour

Je ne sais plus si je vous ai dit que "Cadillac, cadillac" habitait le même immeuble que moi ? Eh si... Je crois bien qu'il me suit en fait. Si, si. Il y a des signes qui ne trompent pas : en formation pendant deux jours, je l'ai revu au restaurant...

Quoi qu'il en soit, la preuve est faite : la scène décrite dans cette chronique est caractéristique de son état "normal", pour autant qu'un tel olibrius puisse avoir un état normal...

16 septembre 2006

Chronique des princesses qui fument

On imagine volontiers les princesses comme de frêles jeunes femmes souffreteuses, qu'un petit pois tuméfie et que la moindre quenouille fait dormir pour cent ans. Au moins. Elles sont jolies et délicates, ou du moins les imagine t-on ainsi, et ne se vêtent que de robes couleur du soleil. Ou de la lune pour les plus taciturnes. Encore les plus simples se contentent-elles d'une robe couleur du temps.

J'ai pourtant vu hier une princesse qui n'était ni délicate, ni parée d'étoffes rares et précieuses, et qui ne craignait pas de se frotter à la violence du monde. Il faut dire qu'elle est taillée pour les gros travaux : 120 tonnes pour 27 mètres de long, elle affiche ses rondeurs sans complexe, boit 150 litres par jour et fume sans discontinuer. Voilà qui découragerait les plus enhardis des charmants princes. Et pourtant, l'arrivée de cette vieille demoiselle de 57 ans a attiré une foule assez conséquente. Car la foule aime les curiosités. Et Sammy aussi, qui n'a pas hésité à ne se nourrir que d'un sandwich afin d'admirer la belle.

Elle est arrivée avec juste ce qu'il faut de retard pour se faire désirer. Lancée à toute allure, elle a ralenti en s'approchant de la foule, s'est mise a siffler violemment en lachant d'imposantes volutes de fumée grise. Et tout le monde a applaudi.

Il faut dire que 241P17 (c'est son petit nom) est une locomotive comme on en voit plus. Avant d'être sauvée du recyclage sous forme de boîtes de conserve par une poignée de passionnés, elle a été fabriquée par les établissements Schneider en 1949 et affectée à la traction à grande vitesse de l'époque, avec une vitesse commerciale de 120 Km/h. Il leur a fallu 13 années de travail pour remettre en état leur "Princesse", obtenir l'agrément de circulation et permettre à ce patrimoine sur roulettes de reprendre du service.

La "Princesse" est une fort belle chose qui mérite ces égards. C'est un monument historique qui témoigne d'un temps pas si lointain. Une époque où les cheminots, la clope au bec et la pelle entre leurs mains calleuses, enfournaient 40 kilos de charbon par kilomètre dans le ventre de la bête. En sifflotant Love me tender, love me suie. C'est du moins ainsi que je m'imagine la chose.


Ils étaient d'ailleurs là, les anciens, les nostalgiques et tous ceux qui ont connus la vie duraille de ce temps là. Dans le train et sur les quais, au milieu de la foule des curieux. Certains diront que se masser par grappes au bord d'une voie ferrée pour regarder passer le train, c'est vache... Ceux là n'ont jamais vu une vraie locomotive à vapeur. Ils n'ont jamais senti cette puissance animale qui se dégage de la machine. Ils n'ont pas admiré les dimensions de la machine, sa beauté de chose désuète, inutile, et pour tout dire indispensable. Car ils n'ont pas vu la fierté dans le regard des hommes.


C'est la chaleur qui surprend en premier. Il doit facilement faire 40 ou 50° dans la proximité immédiate de la locomotive. Ensuite on perçoit l'odeur de fer chauffé et de charbon, à laquelle vient s'ajouter le bruit des jets de vapeur qui semblent ne devoir jamais s'arrêter.


J'ai essayé de traduire mes impressions à travers ces quelques mots ironiques et par l'entremise de photos, rituel imposé de ce genre d'événement. J'aime beaucoup celle-ci, extraite du site officiel de la 241P17 ; elle donne une meilleure idée que les miennes des dimensions de la machine.


La passion des hommes pour les belles choses est un détail nécessaire.

13 septembre 2006

En sortant de Carrefour

Une fille -probablement une vendeuse- téléphone dans l'allée devant les magasins du centre commercial. Elle est en train de décrire un objet quelconque à son correspondant (quelque chose dans le ton de sa voix me fait penser que c'est une amie) ; elle s'accompagne en mimant la chose en question, comme si cela devait permettre à sa correspondante de mieux saisir de quoi il retourne.

A tel point qu'elle finit par caler le téléphone avec son épaule, pour être plus à l'aise dans ses amples mouvements descriptifs. La chose décrite a l'air assez volumineuse du coup. Une armoire ?

J'ai failli lui dire en passant : "vous savez, elle ne vous voit pas ;-)" mais je n'ai pas osé...

12 septembre 2006

Sincérité

La pensée du jour est pour Delph et Lilou.
Merci à vous deux.

11 septembre 2006

Choses vues au volant

A un cédez-le-passage devant un rond-point, un bus est arrêté sur la voie de droite, "warnings" en action. Arrêt temporaire ou problème quelconque, je ne m'attarde pas pour chercher à savoir le pourquoi du comment : je prend la voie de gauche et m'arrête pour laisser passer les voitures déjà engagées dans la boucle. Je regarde la scène dans mon rétroviseur : une, puis deux voitures arrivent, et connement -il n'y a pas d'autres mots- s'arrêtent derrière le bus et attendent qu'il redémarre.

Gageons qu'elles y sont encore.

09 septembre 2006

Concert de rentrée à Dijon

La lune luit faiblement au-dessus de l'église Saint-Michel, tout au bout de la perspective tronquée de la rue de la Liberté. Quelques 300 personnes patientent devant l'estrade aux couleurs de France bleu Bourgogne disposée dans l'arc de cercle de la place. Je suis en avance, ayant pour une fois pris le chemin le plus logique, c'est à dire le plus court. Je me promène parmi la foule, fais le tour des installations, observe avec angoisse la structure métallique de la scène -ça tient bien au moins ?- et m'interroge quant à la signification des tentes dressées dans la cour de la mairie, avant de comprendre qu'elles abritent les premiers secours, sécurité civile et autres brancardiers parés à ramasser les blessés, les malaisés et les morts, le cas échéant.

Je dis malaisés si j'ai envie. Non mais sans blagues.

En attendant le début du concert, je me dirige mollement du côté du théatre, où semble régner quelque agitation. Un général d'Empire accueille le public. Ah bon. Qu'est-ce donc que ceci ? Me mêlant à la foule, j'entre dans le hall où une douzaine de sapeurs barbus, ventrus et anachroniques font une haie d'honneur au pied de l'escalier. Abordant sans vergogne une dame qui, ça se voyait à sa tête, sait, je m'enquis de l'événement qui a lieu ici ce soir.


- Elle, étonnée de mon ignorance : ben c'est un concert, avec la garde impériale
- Moi, indifférent : ah bon
- Elle, s'illuminant, visiblement ça a l'air important : ça vous intéresse ?
- Moi : euh... pas vraiment, non
- Elle, sincérement déçue : oh, c'est dommage, vous avez tort
Laissant là les sectateurs de la grande Armée et du boucher d'Iéna, avec les uniformes, les cuivres, la fanfare, les aigles et le petit chapeau, bref le souffle de l'épopée, je sors et repars vers la place de la Libération. La musique militaire, c'est pas mon truc. D'ailleurs, il est doit être l'heure je pense.

La lune se cache derrière l'extrêmité est des façades de la place, l'animateur ouvre la soirée par le speech de circonstance. Nous nous rapprochons instinctivement de la scène. Trois groupes vont se succéder ce soir : L'odeur des gens, Dorothée Daniel et Iltika. La lune joue à cache cache le long des toits, le concert commence.

L'odeur des gens est un groupe très sympa, avec des chansons à texte -je veux dire qu'elles semblent raconter quelque chose- et un accompagnement accoustique : guitares, percussions. Les trois voix s'accordent bien, les mélodies sont entraînantes ; par contre, ne comptez pas trop sur moi pour vous rapporter les paroles... je ne comprend jamais rien en live (musique trop forte...) et encore, par-rapport au groupe suivant, j'ai compris l'idée dominante de la plupart des chansons. L'amour, l'amitié, la route, et une belle chanson sur le Cambodge, martyrisé par les khmers rouges.


La nuit est maintenant complétement tombée, le froid commence à se faire sentir. La lune sort d'une cheminée, les techniciens s'affairent pour débarasser la scène et installer le matériel du groupe suivant. Un piano de concert surgit de nul part, une batterie est montée à l'extrêmité opposée (côté jardin, si vous voulez, mais on est pas au théatre) et l'animateur de France bleu meuble tant bien que mal le vide imposé. Un ban bourguignon est organisé, je vous expliquerai la chose dans une prochaine chronique.

Les gens autour de moi vont et viennent, se reconnaissent, chahutent et crient. La brise de la nuit m'amène des odeurs mêlées de chewing-gum à la fraise, de sueur, de bière, de vin blanc et d'herbes de Provence à fumer. Quelques pusillanimes se limitent tout de même au tabac.

La lune est coupée en deux par une antenne, Dorothée Daniel et ses instrumentistes entrent enfin en scène. Les chansons, qu'elle interprete d'une voix flutée et cristalline, sont accompagnées au piano et au synthétiseur, que viennent souligner la batterie et une contrebasse. La chanteuse est assez jolie, du coup je m'approche un peu plus de la scène pour mieux voir pour mieux entendre.


Elle chante avec aisance, en s'accompagnant de mouvements de la main droite, absorbée dans son texte. Je n'ai pas compris grand chose aux paroles. Il parait que ça parlait d'amour. Ne voyez là aucune ironie... c'est juste sa voix qui est trop haute et la foule trop bavarde. J'achéterai peut-être le CD, parce que j'ai quand même ressenti quelque chose. J'aurais presque envie de dire qu'elle se rapproche de Pauline Croze, si je ne craignais d'être injuste ; en matière musicale, les comparaisons ne sont pas toujours les compliments que l'on voulait faire. Je pense qu'elle fera parler d'elle d'ici peu.

Il fait désormais assez froid. La vinasse coule à flot. Un ado boit du blanc à même le goulot d'une bouteille dont le bouchon a été enfoncé à l'intérieur. Quelle pitié. Un tel manque de goût me fait hausser les sourcils. Il flotte à la surface du liquide comme celui-ci se renverse pour avaler une grande gorgée. De plus, cette attitude démontre un manque d'esprit pratique affligeant : il est toujours utile d'avoir un bouchon sous la main. Un vrai alcoolique bourguignon doit pouvoir faire face à toutes les situations.

L'animateur fait à nouveau ce qu'il peut pour meubler, mais cette fois, l'attente sera un peu plus longue. Je ne sais pas quoi, mais il y a quelque chose qui ne marche pas. La lune elle-même s'est arrêtée dans sa course pour regarder les technos s'agiter en tout sens. Il nous apprend tout de même que nous sommes 7332 sur la place. Rugissement de la foule. Je me demande comment l'on a procédé pour obtenir un chiffre aussi précis. Mystères de la technique. Sans doute un assistant à l'oeil perçant a-t-il compté toutes les têtes de ce troupeau humain piétinant dans la semi-obscurité. Sans doute aura t-il trouvé le recoin où se cachait Hubert Félix-Thiéfaine qui était, parait-il, présent.


Iltika entre enfin en scène. C'est le groupe le plus original de la soirée. Il mélange du rap et des instruments que l'on a pas l'habitude de lui voir associés. Les textes de Sidi s'accompagnent au violon et à la contrebasse, à la guitare et au luth. Sidi est sur son banc, et déroule ses textes autour de celui-ci, où se produisent des rencontres, des rêves, des tranches de vie.
iltika, porte-voix de tranches de vies, de rencontres routinières ou incongrues.
Les histoires de bancs deviennent l'écho de nos existences ...
(extrait du site)
Je suis ravi d'entendre du rap tel que je le conçois : poétique. Pas ce mélange de rebellion simulée et de haine attisée ou certains se complaisent. La mise en scène est peut-être un peu tape à l'oeil, mais donne de belles images. Le photographe en coulisses a dû se régaler. Le violoniste, se tient en recul, au milieu de la fumée artificielle, juste sous le faisceau strié d'un spot ; vêtu de noir des pieds à la tête, qu'orne un chapeau de la même teinte, il semble irréel.

Le vin blanc -mêlé aux herbes de Provence ?- fait des ravages. La petite bande à côté de moi s'agite bruyamment, les skaters décorés de piercings s'envolent sur les mains de la foule, retombant parfois plus ou moins gracieusement.

Cette partie m'a semblée trop courte. C'est vrai que pas mal de temps avait été perdu en péripéties techniques. L'ambiance entre slam et rap, entre le bled et le quartier des Grésilles (je précise pour les moins dijonnais d'entre vous que c'est un peu notre "zone" à nous, même si il ne faut rien dramatiser. Il suffit juste de marcher vite) me plaisait bien.

Bonne participation du public. Non, ce n'est pas juste à cause du froid. Le charisme déclamatoire de Sidi devait aussi y être pour quelque chose. Et j'ai failli tout comprendre. Seuls les cris perçants de mes voisins alcoolisés me l'ont interdit.


Le concert est terminé, je rentre en heurtant du pied bouteilles vides et verres en plastique. La lune a disparu derrière la scène. C'est un détail sans intérêt.

Salaam.

De dangereux crétins

La pensée unique colonise la société... D'ici peu, si on continue à tenir compte de l'avis éclairé des uns et des autres, on fera des auto da fés de dictionnaires.

Heureusement il reste des personnes intelligentes :
La valeur de la connerie n'attend pas le nombre des années d'exploitation...

07 septembre 2006

Article à faire : la vie de bureau

Exemple : les collègues qui lisent le journal, discutent et mènent leur vie pendant que l'on essaye de comprendre des explications techniques au téléphone. Penser aussi à décrire quelques "cas particuliers" : les bacards, les silencieux, ceux qui te bloquent deux heures dans le couloir et ceux qui disent à peine bonjour...

06 septembre 2006

Chroniques des cerveaux disponibles et du grand nettoyage

En 1997 sortait l'excellent livre de Jean-Philippe Toussaint, La télévision. Je me souviens avoir beaucoup ri en lisant l'histoire de cet homme qui a arrêté de regarder la télévision, et qui passe l'été à Berlin, à n'en plus finir de commencer à écrire un essai sur Titien Vecellio. (Il n'écrira que la première phrase) Je me souviens de deux pages de zapping mémorable. Je me souviens des mésaventures d'une plante verte. (Une fougère) Je me souviens d'un épisode avec des nudistes en plein centre de Berlin. Je me souviens que sa femme s'appellait Delon. Je me souviens qu'il regardait la télévision "les pieds nus et la main sous les parties"


Je me souviens (mais Google m'a un peu aidé) du premier paragraphe :
J’ai arrêté de regarder la télévision. J’ai arrêté d’un coup, définitivement, plus une émission, pas même le sport. J’ai arrêté il y a un peu plus de six mois, fin juillet, juste après la fin du Tour de France. J’ai regardé comme tout le monde la retransmission de la dernière étape du Tour de France dans mon appartement de Berlin, tranquillement, l’étape des Champs-Élysées, qui s’est terminée par un sprint massif remporté par l’Ousbèke Abdoujaparov, puis je me suis levé et j’ai éteint le téléviseur. Je revois très bien le geste que j’ai accompli alors, un geste simple, très souple, mille fois répété, mon bras qui s’allonge et qui appuie sur le bouton, l’image qui implose et disparaît de l’écran. C’était fini, je n’ai plus jamais regardé la télévision.

Si vous voulez du rab, c'est par là...


Je me souviens de Georges Perec aussi !
Quand je suis arrivé dans cet immense appartement que j'ai la joie d'occuper depuis maintenant 31 mois, je n'avais pas de télévision. C'est une acquisition somme toute assez récente, que j'avais longtemps différée, craignant de ne pas trouver la place suffisante pour caser l'objet, et d'une utilité que l'usage me pousse à remettre en question. Mais je la garde, j'aime trop me mettre en colère devant la bêtise affligeante de certaines émissions, ou encore devant l'inculture abyssale de certains candidats à des jeux diffusés sur une chaîne qui en a juste gardé le maillon. Tout ça pour rendre disponible du temps de cerveau. Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris.

***

Puisque vous en mourrez visiblement d'envie, je vous offre cette pensée mémorable dans son intégralité, juste pour la beauté de la chose :
Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective business, soyons réaliste : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit.

Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible.

***

Pour être totalement honnête, je dois reconnaître mon ravissement sans borne à payer cette taxe moyennageuse qui me fait rentrer de plain-pied dans la caste des possédants. Vulgairement nommée la redevance -mais de quoi suis-je redevable, j'aimerais bien le savoir- elle n'est pas sans rappeller l'ancienne et regrettée gabelle. Voilà encore une opinion d'une mauvaise foi ahurissante, que vous devrez vous efforcez de replacer lors de votre prochain repas chez Tatie Germaine, mais je vous confiance. D'ailleurs, et c'est sûrement l'époque qui veut ça, le progrès fait rage. Je l'ai entendu sur France Inter ce matin, Le Monde de ce soir me le confirme : le gouvernement envisage sérieusement d'étendre la redevance à la télévision sur internet. Je crois que je n'avais rien entendu d'aussi stupide depuis la proposition de taxer les e-mails de la même manière que le courrier papier. J'y reviendrais peut-être un de ces jours.
Le gouvernement réfléchit à une évolution des modalités de collecte de la redevance afin que les personnes recevant la télévision sur un ordinateur soient, elles aussi, assujetties à cette taxe, a indiqué, mardi 5 septembre, le ministre de la culture et de la communication, Renaud Donnedieu de Vabres. "Demain, peut-être faudra-t-il faire évoluer les modalités de l'assiette de la taxe", a déclaré le ministre. "Peut-être faudra-t-il faire évoluer la petite phrase" qui figure sur le formulaire de la taxe d'habitation et qui demande au contribuable s'il possède ou non un poste de télévision, a-t-il ajouté.
Notre bien aimé ministre de la culture et de la communication est en passe de devenir l'homme le plus populaire du web. Quel chance il a. Toujours est-il que regarder des conneries va devenir un luxe que bien peu pourront se permettre. Si ça continue à ce rythme, il n'y aura bientôt plus qu'une télévision par immeuble, achetée collectivement par les locataires. On se regroupera autour, le soir, à la veillée, dans un esprit de fraternité qui nous manque aujourd'hui. Les commentaires n'en seront que plus pertinents, jamais encore l'intelligence, les bons mots et les traits d'esprits des animateurs et autres impertinents trublions n'auront été si pieusement consignés (en un seul mot). De temps en temps, un flash d'information viendra interrompre la publicité. Une facture sortira par un ingénieux dispositif ménagé en bas de l'écran. La grand-mère pédalera pour alimenter une dynamo, afin d'économiser l'énergie.

Mais le temps de cerveau humain disponible est à ce prix.

Même si je regarde assez peu la télévision, je dois admettre que je le regarde tous les jours. En mangeant. Tout le monde a ses faiblesses. Hier soir, je me suis ainsi retrouvé à regarder distraitement un objet télévisuel non identifié, en mangeant un lapin bien dur. La semaine prochaine, on se remet à l'escalope de dinde. La chose s'intitule "C'est du propre" et effectivement, c'est pas triste. Je vous présente briévement le concept : deux fées du logis se rendent dans le bouge d'un gros sale ou d'une vieille crasseuse, et nettoient l'innettoyable en moins de temps qu'il ne faut pour le filmer. (Et dire qu'il me faut 2 heures pour nettoyer une cuisine de 2 mètres sur 1 !) Une fois de plus, je me suis demandé si c'est vrai, ou si l'ensemble des participants ne serait pas des comédiens payés par la production. C'est trop sale pour être vrai. Même dans les pires moments de déprime, je n'ai jamais pu atteindre cet optimum de la crasse. A croire que je ne suis pas bien doué.

Car les lieux présentés, à défaut de joindre l'éclat à la blancheur, unissent la saleté la plus repoussante au bordel le plus ahurissant. Je m'étais demandé il y a quelques mois de cela, comment les camelots proposant à la vente des nettoyants magiques faisaient pour présenter au public des objets aussi sales, pour les besoins de leur démonstration. Je pense qu'ils doivent les salir eux-même. Ce qui prouvent bien qu'il y a une technique. Une science. Pour tout dire, un art.

De fait, c'est avec le décapage d'un appartement-atelier d'artiste qu'il m'a été donné de voir le déroulement complet du processus. Les fées Carabrosse et Mézydelordre -car ce sont elles- commencent par visiter les lieux en s'extasiant sur la performance de l'artiste. "comment fait-il pour obtenir cette couleur particulière ?" Avisant l'évier : "J'adore les coulures" ; "C'est l'art de la saleté" Ensuite vient la petite séquence de morale. On gronde gentiment le peintre de s'être ainsi laissé aller. On lui fait remarquer que les vêtements se rangent dans une armoire et ne s'empilent pas un peu partout. Que les éviers tout noirs, c'est peut-être très joli, mais c'est dégoutant. Que c'est certes pratique de se servir d'une mézzanine comme d'une décharge, mais ça limite considérablement la surface utile. Qu'il ne sert à rien de conserver les noyaux d'avocats jusqu'à ce qu'ils germent, au milieu des assiettes. Non, non. C'est inutile.

Bref, que le ménage n'est pas réservé aux femmes ; que la poussière ne se fait pas tous les quarante ans, mais une fois par semaine.

Le gros barbu septuagénaire se dandine comme un éléphanteau pris en faute. Qui aurait, par exemple, aspergé un touriste innocent, ou barri férocement au passage du prince héritier du Japon, mettant ainsi en péril les capacités auditives futures de l'espoir impérial d'une dynastie dont, entre nous, on se fiche... royalement. Bref, il a honte. On le comprend aisément. Car il n'est pas agréable d'être ainsi gourmandé devant les caméras. Le vilain coquin. "Voui m'dame, j'le ferai pû"

Le plus drôle dans ce genre d'émission, c'est l'indispensable voix off qui pense littéralement à la place des personnes filmées.
Face à cette métamorphose, Dominique a du mal cacher son émotion
Il y a quand même, et ça m'a surpris, un second degré certain. Les protagonistes ne sont pas présentés comme des propres à rien, si vous me permettez ce jeu de mot, mais comme des victimes de la saleté, qu'il faut sans doute s'imaginer comme une déesse malfaisante prête à frapper nos intérieurs aseptisés. D'ailleurs les deux héroïnes sont là pour en découdre avec la saleté, ce qu'elles font avec ardeur, sitôt descendues de leur clean mobile. Et quel est leur loisir favori ? Regarder un bon programme... de machine à laver !

Si les émissions a priori débiles se mettent à faire de l'ironie, peut-être que tout espoir n'est pas perdu. A condition qu'il nous reste assez d'espace de cerveau disponible pour la comprendre.

C'est un détail qu'il ne faut pas négliger.

***

Crédits et discrédit :
La photo de Toussaint vient du site des éditions de Minuit, c'est Bilal qui a dessiné Perec, les vignettes des folles du ménage ont été piquées sur le site de M6.
Le nettoyage de cerveau est de l'inénarable Patrick Le Lay.

05 septembre 2006

C'est du propre ?

Je regarde distraitement cette chose télévisuelle non identifiée en mangeant un lapin -bien dur ma foi. La semaine prochaine, on se remet à l'escalope de dinde. Une fois de plus, je me demande si c'est vrai, ou si l'ensemble des participants ne serait pas des comédiens payés par la production. C'est pour ainsi dire trop sale pour être vrai. Même dans les pires moments de déprime, je n'ai jamais pu atteindre cet optimum de la crasse. A croire que je ne suis pas bien doué.

04 septembre 2006

Comment devenir un blogeois ?

C'est simple : il faut poster souvent, si possible plusieurs fois par jour, parler des nouvelles technologies, de toutes les nouveautés du web, quitte à reprendre une info maintes fois développée (et bien souvent en mieux) par ailleurs. Surtout, et c'est là le point le plus important, il faut être persuadé que les moindres détails de sa vie intéressent la foule.
Aaaah. Que ça fait du bien d'être méchant.

01 septembre 2006

Livre en cours

Je suis tombé dans La peste. J'ai ouvert le bouquin il y a deux jours, j'ai lu distraitement le premier chapitre, et ma distraction ma amené jusqu'au 10ème chapitre. C'est balot pour le Kundera commencé il y a un mois...